Á la Lune

Á la Lune

Stuart Merrill

Stuart Merrill

 

Nocturne

 

A Joris-Karl Huysmans.

 

La blême lune allume en la mare qui luit,

Miroir des gloires d'or, un émoi d'incendie.

Tout dort. Seul à mi-mort, un rossignol de nuit

Module en mal d'amour sa molle mélodie.

 

Plus ne vibrent les vents en le mystère vert 

Des ramures. La lune a tu leurs voix nocturnes :

Mais à travers le deuil du feuillage entr'ouvert

Pleuvent les bleus baisers des astres taciturnes.

 

La vieille volupté de rêver à la mort

A l'entour de la mare endort l'âme des choses.

A peine la forêt parfois fait-elle effort

Sous le frisson furtif de ses métamorphoses.

 

Chaque feuille s'efface en des brouillards subtils.

Du zénith de l'azur ruisselle la rosée

Dont le cristal s'incruste en perles aux pistils

Des nénufars flottant sur l'eau fleurdelisée.

 

Rien n'émane du noir, ni vol, ni vent, ni voix,

Sauf lorsqu'au loin des bois, par soudaines saccades,

Un ruisseau turbulent croule sur les gravois :

l'écho s'émeut alors de l'éclat des cascades.

 

Les Gammes (1900)

 

Delvaille : la poésie symboliste

 



21/06/2017
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